On ne parle que d’elle, elle est contente. Déjà fatiguée, mais toujours assez orgueilleuse pour vouloir disparaître comme n’importe quelle autre journée de l’année. On est fatigué, nous aussi. Mais on vit avec dignité cette fatigue, comme si ce n’était qu’une longue journée de travail où on s’endort un moment pour reprendre ses forces et continuer, ne sachant plus ce qui est vrai, ce qui n’est qu’un rêve, ce qui n’est qu’un délire. Un cocktail bien mélangé de tout ce qui peut exister de beau et de moche. Et on le boit, on a soif. Plus on en boit, plus on y trouve du goût. Pas bon, pas mauvais, spécial. On le bois, parce qu’il y en a rien d’autre. On est obligé, pour survivre. Ceux qui sont restés à jamais dans cette matinée incessante, qui en ont trop bu sans le vouloir, sans faire exprès, on leur doit bien ça. On va tenir, le temps qu’il faudra. On va honorer leur mémoire avec quelque chose d’autre, un jour, un autre jour, quand il aura assez de force pour pousser celle là à partir. On le voit déjà naître. Il est simple, pas du tout orgueilleux, prêt à partir à son tour dans les 24 heures. Il sera le premier, il cédera sa place facilement. Et ainsi de suite. La vie normale reprendra.
P. S. Sur la photo : la queue devant le distributeur à 9 heures du matin 24.02.2022
Guerre
Ukraine
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Artem SAVART
Russe de nationalité et francophone par amour de la langue, vivant en Ukraine depuis 2019. Programmeur WordPress, traducteur et entrepreneur. Ce blog est un témoignage de mon quotidien à Odessa pendant la guerre, ainsi qu'une source d'informations sur les sites web, les blogs, le SEO et le marketing.
Comments (2)
Marie Remacle
1.03.2023 à 16:24
Courage et dignité! Je vous admire, vous et tous ceux qui se battent pour retrouver la liberté. J'entends votre voix à la RTBF avec plaisir.